La cité

Gérard Ruiz.Marseille 1972.

 Dans la cité citerne,
Les lumières s'allument,
Les fenêtres se ferment,
Les ruelles s'enrhument.

 Sur les places placides,
Les statues stationnent,
Le visage ovoïde,
Et la fesse friponne.

 Dans les ombres honteuses,
Quelques putains potinent,
La chair généreuse,
Emboîtée de bottines.

 A petits pas peureux,
Des passants parsemés,
Se suivent silencieux,
Le regard aux aguets.

 Dans le jardin, lubrique,
Un satyre satisfait,
Viole une vieille fille
Qui y philosophait.

 Dans les avenues vides,
Des platanes platoniques,
Arrogants et rigides,
Parlent de politique.

 Dans les faubourgs fourbus,
Des usines usagées,
Aux cheminées chenues,
Finissent de fumer.

 Des toitures dégoûtées,
Toisent de toutes leurs tuiles,
La tourbe entôlée,
Des vils bidonvilles.

 Et les dortoirs s'endorment.
Quelques pistons qui pulsent,
Quelques cœurs qui cognent,
Des vies qui se révulsent.
Dans la cité citerne,
Quelques lumières s'éteignent.

***